jeudi 29 octobre 2009

Mr Skeffington

Malgré son nom tudesque, Elizabeth von Arnim est, en tous cas quand elle écrit, plus anglaise que la reine Victoria. Etats d'âme féminins et vagabondages dans un univers tout de conventions où chaque geste, chaque inflexion et chaque nuance prend un sens précis: on aime ou on n'aime pas, mais en tous cas, dans ce genre de roman, l'intrigue s'efface souvent derrière l'ambiance. Le sujet de Mr Skeffington, qui n'échappe pas à la règle, est en soi assez confondant: l'ex madame Skeffington, heureusement divorcée depuis vingt-cinq années bien remplies grâce à son charme et à sa beauté, se trouve à la veille de ses cinquante ans dépouillée de ses arguments physiques et, de plus, hantée par le fantôme de son mari, qui occupe son ancienne chaise devant la table du petit déjeuner.

Elizabeth von Arnim tire de cette mince entrée en matière un développement dont le moins qu'on puisse dire est qu'il fait peu de place à l'inattendu. La pauvre Fanny, qui a perdu ses repères avec ses attraits, rencontre successivement tous ses anciens chevaliers servants dans une collection de scènes apocalyptiques (sur le plan mondain, bien entendu). Ce chemin de croix culmine dans un épilogue parfaitement ridicule et prévu depuis la page 4, avec en prime une intervention des nazis comme Deus ex Machina, ce que j'ai pris comme une insulte personnelle.

Comme il est cependant évident qu'Elizabeth von Arnim considère l'intrigue ainsi résumée avec autant de dérision que le fera son lecteur, et qu'elle ne l'utilise que pour promener jusqu'à la rédemption une héroïne pour qui on se sent vite quelque tendresse et pour dresser autour d'elle un véritable jardin zoologique d'anciens amants décatis, on passe un fort bon moment. Et, bien sûr, l'écriture, "délicieuse", n'y est pas pour rien.

Mr Skeffington, Elizabeth von Arnim

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