samedi 12 décembre 2009

The American Civil War, a military history

The American Civil War est, après Battle Cry of Freedom de J.McPherson, ma seconde plongée dans la Guerre de Sécession (je ne compte pas les lectures d’Autant en emporte le vent). Pourquoi – et comment – écrire sur un sujet qui a déjà fait l’objet d’une somme telle que celle de McPherson ? c’est un problème qui doit, je suppose, se présenter fréquemment aux historiens, appelés généralement à creuser plusieurs fois le même sillon. Je leur saurais gré, à l’avenir, d’indiquer clairement dans leur introduction quels enrichissements, quel point de vue particulier et encore inexploré, quelle thèse nouvelle ils envisagent d’apporter au sujet traité. Sans avoir beaucoup de points de comparaison, je trouve en effet que c’est le principal reproche que l’on peut adresser à The American Civil War. Il faut se fier pour identifier le projet de l’auteur au sous-titre (« a military history », ce qui n’apporte pas grand-chose, une fois qu’on connaît Keegan) et à une introduction un peu fumeuse qui semble poser comme question essentielle celle de la longue capacité de résistance d’un Sud économiquement et démographiquement surclassé par son ennemi.


Heureusement, si les esprits chagrins (tels que le mien) sont légèrement indisposés par cette entrée en matière peu percutante, le livre prend rapidement son essor. Keegan tient sa promesse d’offrir une histoire essentiellement militaire de l’évènement, en tordant le cou en deux chapitres aux origines de la guerre. Quatre chapitres plongent ensuite dans le vif du sujet en décrivant les conditions qui prévalaient à l’organisation, au commandement et à la conception stratégique, et aux opérations elles-mêmes. De cette partie se dégagent déjà les points que Keegan éclairera particulièrement tout au long du livre : les problèmes de commandement et en particulier la personnalité des principaux généraux, la géographie de la guerre, et les conditions de vie du soldat.


Vient ensuite le morceau de bravoure obligé qui consiste à retracer les opérations militaires de façon à peu près chronologique. Ce récit est forcément un peu laborieux pour le lecteur, accroché à sa carte et voyant défiler les batailles toutes plus sanguinolentes les unes que les autres. Il y a celle où le plus grand nombre d’Américains est mort en un jour ; celle où le plus grand nombre de Nordistes est mort dans l’Ouest ; celle où le plus grand nombre de Sudistes est mort en une seule charge ; celle où le plus grand nombre, de quoi, déjà ? est mort en une semaine ; on se perd un peu dans tous ces records macabres. On doit savoir gré à Keegan de se dépêtrer de l’exercice en 330 pages, soit à peine plus de la moitié du livre. Je ne lui tiendrai pas rigueur de se répéter un peu par moments, car cela aide à se créer des repères dans une chronologie embrouillée par la multiplicité des théâtres d’opérations et par le nombre invraisemblable de batailles répertoriées.


Les derniers chapitres sont thématiques, donc beaucoup plus faciles à lire même s’ils donnent par moments l’impression d’être inexplicablement tortueux ou non concluants. Ainsi le chapitre sur les soldats noirs montre comment ces unités ont du faire leurs preuves avant d’être acceptées par leurs compagnons d’armes blancs… et conclut cependant que les soldats de couleur ont été intimidés, plus que déterminés, par la sauvagerie des Sudistes à leur endroit. On ne sait finalement plus très bien quoi penser de leur combativité. L’avant-dernier chapitre commence, lui, par une phrase de 118 mots, ce que j’ai trouvé un peu excessif, sans doute à cause de mon insuffisante maîtrise de la syntaxe anglaise.


Je suis peut-être un peu critique avec Keegan ; le fait est qu’avec tous ses défauts, mineurs à vrai dire, The American Civil War me paraît répondre à la problématique posée en introduction, en montrant notamment comment la géographie privait les belligérants de tout objectif à la fois stratégique et accessible. Le Sud, avec ses vastes espaces, son alimentation produite là où elle était consommée et l’absence de tout pôle industriel, constituait un défi à la stratégie militaire. Par ailleurs, Keegan déploie à nouveau sa capacité à rendre présent et humain le drame de la guerre, en particulier à travers les portraits des généraux (qu’il se permet pratiquement de noter, ce qui est finalement assez réjouissant). Et parce qu’il n’oublie jamais que l’aspect militaire n’est qu’une des facettes de l’histoire, la conclusion spécule intelligemment sur l’impact de l’aventure du soldat sur la vie politique des Etats-Unis après la guerre.


The American Civil War, John Keegan, 2009

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