Depuis Moins que zéro, les personnages de Bret Easton Ellis abritent derrière leurs façades bronzées et leurs signes extérieurs de richesse les abîmes de leur vertigineuse absence d’empathie. Depuis American Psycho, on sait que les voyages au fond du gouffre qu’Ellis affectionne peuvent s’écrire vicieusement à la première personne. Les héros d’Imperial Bedrooms sont plus âgés que dans Moins que zéro, plus âgés aussi que Patrick Bateman, et ils se sentent vieux; mais ceci mis à part, il est difficile de voir ce qu’il y a de nouveau dans ce roman. L’âge et le succès ne font guère que modifier les ficelles du pouvoir qu’ils exercent sur leurs victimes; le temps les a dotés de téléphones portables et les a rendus accros aux SMS. Mais on ne va pas plus loin.
Comme on ne lit certainement pas Bret Easton Ellis pour le plaisir, je ne vois pas trop quelle motivation subsiste si, en plus, il n’y a plus de surprise. Et ce qui ressort finalement de ce quasi-cycle romanesque, c’est l’extrême pauvreté d’invention de ce petit enfer qu’est le Los Angeles d’Ellis. Allez écrire la Comédie Humaine en jouant sur de si maigres ressorts! le sexe, l’argent, le pouvoir: Balzac n’avait pourtant pas beaucoup plus de cordes à son arc, mais il entraînait son lecteur dans des constructions sociales et psychologiques infiniment plus riches que l’univers strictement bidimensionnel d’Ellis. Alors, évidemment, on me dira que c’est justement sur cette pauvreté que Bret Easton Ellis veut attirer notre attention; je maintiens qu’il l’avait déjà fait, et qu’il n’a pas besoin d’écrire, pour se faire comprendre, de nouveaux romans qui ne disent rien de plus que les anciens.
Imperial Bedrooms, Bret Easton Ellis, 2010
jeudi 30 septembre 2010
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