Je suis revenue extrêmement dubitative de la représentation de l’Histoire du Prince Pipo à laquelle j’ai assisté avec ma marmaille ; je n’arrive pas à me figurer pour quel public, au juste, ce spectacle est conçu. L’histoire de Pipo est celle du passage à l’âge adulte du héros qui, monté sur son cheval Pipo (eh oui) échappe à ses parents transformés en affreuses caricatures, se fourvoie en République Populaire de Tyrannie, se change provisoirement en dragon puis atterrit dans une Très Grande Bibliothèque pour y lire le livre de sa vie avant de retrouver la Princesse Popi, de l’épouser et de succéder au feu roi son père. Le tout en une heure.
Du point de vue de la forme, le théâtre pour enfants me paraît assez traumatisant. Les acteurs en font des tonnes, crient et se contorsionnent, ce qui ne manque jamais de terrifier ma progéniture peu habituée à ce que les adultes se roulent par terre pour un oui ou pour un non. Quand l’intrigue n’est pas indigente, avec deux malheureux personnages (comme dans Pierre et la Princesse ensorcelée que nous avons vu en janvier), elle est horriblement confuse à cause du très petit nombre d’acteurs qui jouent alternativement des nains, des sorcières, des rats, des princesses et des aubergistes. De plus, les metteurs en scène usent d’expédients difficiles à comprendre : ici, par exemple, en chargeant une actrice de personnifier l’Histoire, en dévoilant uniquement la tête de certains personnages très en hauteur pour signaler qu’ils sont éloignés, ou en représentant un combat à mort avec un dragon par une lumière rouge derrière un drap, ce qui, on l’admettra, est quelque peu elliptique.
Sur le fond, l’épopée initiatique est tellement transparente pour un spectateur adulte que c’en est un peu gênant ; il est difficile de comprendre comment une métaphore aussi pataude peut parler à l’inconscient du jeune public – voire, d’ailleurs, à son conscient. Est-ce que les petits enfants s’interrogent sur le passage à l’âge adulte ? Les miens ont l’air de considérer que quand je serai vieille, ils seront adultes et pourront affronter mon trépas avec sérénité (voire avec soulagement).
Malgré tout, j’hésite à porter sur ce spectacle un jugement définitif. Peut-être, comme un conte de fées, nourrit-il l’imagination de son public par la marge d’incompréhension qu’il préserve – en l’occurrence par des procédés à mon sens assez malhonnêtes, mais peu importe. Noyés de mots, ahuris et terrifiés pendant une heure, mes enfants sont sortis de là très contents de leur après-midi. Je ne comprends rien au théâtre pour enfants, décidément.
Histoire du Prince Pipo, Pierre Gripari
lundi 22 mars 2010
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